MB&F: Horological Machine n°4 "Thunderbolt"

On a déjà beaucoup parlé de cette HM4, Max Büsser ayant un talent certain pour créer l'événement et présenter ses nouveautés en dehors des calendriers horlogers traditionnels.

Imaginer une nouvelle Horological Machine n'est pas une tâche simple: il faut à chaque fois surprendre et se distinguer des précédentes Machines. Malgré cela, au moment où MB&F fête ses 5 ans, Max Büsser peut fièrement contempler une collection composée de 4 modèles de base dont certains comportent des déclinaisons très différentes de la version d'origine.

On sentait bien poindre à travers le passage entre la HM2 et la HM3 que la voie choisie par Max était d'imaginer des montres, ou plutôt des objets horlogers en trois dimensions, comme des sculptures, où tous nos repères seraient bouleversés.

La HM4 s'inscrit totalement dans cette logique. La HM4 n'est pas une montre telle que nous l'entendons traditionnellement. Ici, il n'y a pas à proprement parler un boîtier, une lunette, un cadran: la HM4 est un tout tridimensionnel.

La HM3 (Starcruiser ou Sidewinder) proposait de voyager dans l'espace. La HM4 nous transporte dans les airs en rendant hommage à l'avion Thunderbolt A10: la forme de la montre, l'affichage des informations, la façon dont le mouvement (ou plutôt le moteur!) est dévoilé, tout nous évoque l'aéronautique. Le souci du détail a poussé l'utilisation d'un cuir de veau rappelant le blouson des aviateurs pour le bracelet.

Sa forme aérodynamique, accentuée par la façon dont se prolongent les deux cônes au bout desquels se trouvent les deux couronnes, donne un côté élancé à la HM4 qui est le bienvenu compte tenu de l'impressionnant gabarit. Donner les dimensions (54mmx52mmx24mm) de façon abrupte a peu de sens: il faut porter la montre pour bien saisir la sensation de volume qu'elle procure.

Contrairement aux trois premières Machines où les indications relatives au temps étaient éclatées, ici, le cadran droit (au sens d'instrument sur le tableau de bord) affiche de façon classique l'heure. Imaginez la grande première au sein de MB&F! Les aiguilles des minutes et des heures se retrouvent dans la même cadran et il n'y a ni heures sautantes, ni minutes rétrogrades. Ce n'est pas innocent: cet affichage rappelle le contexte aéronautique et celui des montres d'aviateur totalement pensées pour une lisibilité maximum. Le cadran de gauche est occupé par l'indicateur de la réserve de marche. Les deux couronnes sont donc logiquement placées: à droite pour régler le temps, à gauche pour remonter le mécanisme.

S'il fallait trouver le point commun entre toutes les Machines, ce serait la présence de deux zones dédiées à l'affichage des fonctions et la totale cohérence entre le mouvement et le boîtier. Il suffit d'une seconde pour deviner à quelle Machine correspond tel mouvement. Avec la HM4, c'est la même histoire et compte tenu du design impressionnant de la Thunderbolt, le calibre ne pouvait être qu'hors norme!

Pour la première fois, Max Büsser abandonne l'automatisme: le mouvement est à remontage manuel et a nécessité 3 ans de développement de la part des Artisans Horlogers. Mouvement d'une fréquence de 3 hz et d'une réserve de marche de 72 heures, il se distingue par son architecture très particulière à double couronne, par la forme audacieuse du pont annulaire du balancier et par le rappel, amusant, du rotor de la masse oscillante des calibres automatiques de MB&F grâce à un pont en double astéro-haches situé sur le verso du mouvement.

Il ne doit pas être observé selon nos critères habituels compte tenu de sa présentation originale. Cependant, lorsque le mouvement est sur l'établi, nous nous rendons compte du grand soin apporté aux finitions, que ce soit les anglages ou les terminaisons de surface. Une fois monté, le contexte de la HM4 l'étouffe un peu et ce serait dommage d'oublier de souligner cette qualité d'exécution.

Cette qualité se retrouve aussi dans la pièce saphir située derrière les deux cadrans et qui a nécessité un travail d'usinage d'une rare précision de la part de Stettler. La forme de la pièce est si inhabituelle que le travail réalisé sur la HM2-SV est d'une simplicité biblique à côté!

Lorsque la montre fut dévoilée, la première question qui vint à l'esprit des observateurs fut celle de sa portabilité et du confort au poignet.

Si vous êtes adeptes de la montre sous la chemise, vous serez déçus car du fait de sa hauteur et de sa longueur, elle ne passe pas sous une chemise classique.

Si vous aimez les montres bien positionnées sur le poignet, alors la HM4 remportera vos suffrages car la montre ne bouge pas, ne bascule pas. Cela est dû à la forme particulière du boîtier et notamment des pièces de côté qui épouse bien le poignet. Mais c'est la boucle déployante, fabriquée par Chatelain qui contribue le plus fortement à ce confort. La boucle est très bien pensée: j'ai vraiment secoué très fort le bras et malgré le poids, la montre n'a pas bougé. Il s'agit d'un point fondamental pour une telle montre.

Alors, que faut-il conclure sur cette HM4? Tout d'abord, qu'une nouvelle fois, Max a réussi son coup: la HM4 tranche avec le reste de la collection et provoque des réactions de forte adhésion ou de rejet. Ce n'est pas simple d'éviter l'écueil du conformisme et de savoir remettre en cause ses acquis. Deux points m'ont particulièrement plu dans cette HM4:
  • la subtilité et la cohérence du dessin: il est complexe mais semble simple et naturel. Il y a tellement de détails à observer que la montre ne se dévoile que lentement.
  • l'architecture du calibre totalement dans l'esprit de la montre
En revanche, j'aurais préféré plus d'originalité soit dans le système d'affichage de l'heure soit dans la complication se trouvant dans le cadran gauche. Le classicisme des fonctions contraste avec le reste de la Machine et je trouve que sur ce point, l'hommage au A10 a peut-être freiné l'élan créatif. Il n'en demeure pas moins que cette HM4, au même titre que les 3 précédentes, marque de son empreinte l'année horlogère.

Un grand merci à Max Büsser pour sa disponibilité et son accueil.